Stone et Charden

Entre Bretons et Normands, il paraîtrait qu'une certaine animosité subsiste. Qu'à cela ne tienne, reporter de l'extrême, je suis allée passer quelques jours en Normandie cet été. Car oui, bien que bretonne, j'ai de la famille et mon amoureux a des amis en Normandie, certains de mes collègues me répondraient : "Personne n'est parfait".

Nous voilà donc parti un lundi, sous le soleil breton, direction une petite bourgade du Calvados pour un barbecue. Et oui, nous sommes arrivés sous le soleil normand. Hormis un fabuleux camembert cuit dans les braises et aromatisé au calva, point de découverte normande le premier soir.

Le lendemain s'est hissé au paroxysme du tourisme normand : la mémoire du débarquement en 1944. Pointe du Hoc, cimetière américain, au milieu des nombreux touristes de tous horizons. Touristes qui, il faut bien le dire, ont tendance à minimiser l'impact émotionnel de toutes ces croix blanches alignés dans la verdure. Surtout que, mieux vaut tard que jamais, j'ai réalisé après la visite d'un bunker de la pointe du Hoc que mes parents m'avaient déjà emmenée visiter ce lieu. Une piqûre de rappel toutefois pas inutile, puisque le site a été abondamment aménagé ces 20 dernières années : grillages qui abritent des moutons, passerelles pour monter sur les constructions allemandes, gigantesque mémorial à la sortie du non moins gigantesque parking envahi de bus. Moment propice à une rélfexion de professionnelle du patrimoine : ces aménagements,certes nécessaires, et ces sécurisations, tout aussi nécessaires, ne disneylandisent-ils pas un lieu de mémoire comme celui-ci ? C'était en tous cas rafraîchissant de visiter ces espaces en compagnie d'un enfant de 5 ans, qui était ébloui par les innombrables cratères de bombes sur la Pointe du Hoc, et concentré à compter les fleurs sur les tombes américaines. Jeu qui m'a amenée à rechercher les provenances des soldats enterrés, occasion s'il en est de réaliser qu'on est bien incapable de citer les 50 états américains.

Une journée fort bien achevée par un repas universel, une tradition qui, me semble-t-il, se retrouve dans tous les pays et toutes les cultures : le sacro-saint barbecue en bord de plage. Pas n'importe quelle plage : Omaha Beach, à Saint Laurent, dans une fort jolie maison, avec des gens fort sympatiques, et une vue splendide sur ladite plage. Que demander de plus ? Et bien peut-être un peu plus de chaleur, parce qu'à 22h en Normandie le 18 août, on fait pas son fierot de breton et on enfile un gilet, quand même. Là où, me semble-t-il dans mon chauvinisme, on aurait attendu 23h en Bretagne...

Quelques verres de rouge plus tard, une soirée bien remplie et un retour dans un logement magnifique, une petite maison d'invité charmante au sein d'une très belle propriété. Merci à elles si elles nous lisent !

Et enfin, le mercredi, moment fort de ce court séjour : tournoi de pétanque, avec des amis de longue date, dans un restaurant qui fait office de QG. Pour moi, que de découvertes : des gens, évidemment, un lieu très agréable, aussi, mais surtout, la pétanque. Sport que je n'avais pas pratiqué depuis mes 8 ans. On ne m'en voudra donc pas d'avoir échoué au premier tour. Enfin, on était deux quand même. Et pis c'est moi qui ai marqué le seul point. La pétanque a toutefois été le révélateur d'un schisme profond entre Bretons et Normands. En effet, alors que mon ami et moi attribuions le beau temps des derniers jours à notre seule et unique présence en territoire ennemi, les indigènes ont, eux, considéré que notre présence avait déclenché l'averse qui a malencontreusement interrompu le tournoi. Mauvaise foi quand tu nous tiens. Les mécréants ont même osé nous chasser à coups de parapluie.

Bref, un séjour en Normandie court, mais qui pourrait devenir une routine, histoire de rappeler à nos chers voisins du nord qui c'est les patrons du cidre ! ;)